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Edito n°2

Épilogue de l’affaire Sarah Halimi

La Cour de Cassation a rendu son verdict dans le débat médico-légal faisant suite au meurtre de Sarah Halimi et la Communauté juive en a été profondément bouleversée. Le meurtrier ne sera pas jugé en raison d’une « bouffée délirante » ayant aboli son discernement où le contrôle de ses actes (art. 122-1 du Code Pénal). Le code pénal prévoit en effet, que celui qui était atteint d’un trouble ayant aboli son discernement au moment du crime, n’est pas pénalement responsable. En revanche, celui qui était atteint d’un trouble ayant altéré son discernement est pénalement responsable : il passera en procès et l’altération de son discernement sera pris ou non en compte quand  viendra le temps de fixer sa peine.

Dans le cas du meurtrier antisémite de Sarah Halimi, battue et défénestrée, les experts n’étaient pas unanimes. Deux évoquaient une abolition du discernement, l’autre évoquait une altération. La Cour de cassation aurait  pu tirer parti de ce désaccord  pour casser et renvoyer l’affaire  en arguant qu’il aurait fallu dans un tel cas une unanimité des opinions. Elle aurait peut-être tordu un peu le droit, mais la Cour l’a déjà fait et elle continuera à le faire dans certains cas. Son rôle est d’interpréter et non d’appliquer mécaniquement.

L’assassin, un dealer de drogue, aurait été pris d’une bouffée délirante. Allez définir une bouffée délirante ! Les experts le peuvent. C’est peut-être possible sur un fou qui est fou en continu mais dans le cas de M. Traoré, les experts estiment que c’est un individu normal qui consomme du cannabis depuis des années, qui est pris d’une bouffée délirante et qui après, redeviendrait normal. Cela semble bien complexe pour donner une opinion certaine et éclairée. Notons au passage, que des millions de Français consomment du cannabis et ne deviennent pas des meurtriers. En tous les cas, sa bouffée délirante ne lui a pas fait oublier qu’il était antisémite, puis qu’il a défenestré Sarah Halimi aux cris de « Allah est Grand » et qu’il a jugé que Sarah Halimi représentait le Mal.

La Cour de Cassation a fait savoir que « le juge ne peut pas distinguer là où le législateur ne distingue pas » proposant ainsi prudemment une réécriture de l’art. 122.1 du Code Pénal.

L’affaire Sarah Halimi est douloureuse et ce choc s’ajoute aux chagrins que nous causent les disparitions de personnalités juives qui ont œuvré passionnément pour la mémoire de la Shoah : Ady Steg ; bâtisseur de notre Communauté, enfant caché, adolescent résistant, chirurgien renommé, président de l’Alliance Israélite Universelle, âme et moteur de la Commission Mattéoli qui a recommandé au gouvernement et obtenu la création de la CIVS , de la FMS et de la pension des orphelins, intelligence exceptionnelle alliée à une profonde humanité. Un homme regretté de tous, ce qui est rarissime.

Son contemporain, Ralph Feigelson, également tout jeune résistant lui aussi, déporté à Auschwitz le 31 juillet 1944. Evadé le 27 janvier 1945, il rencontre le premier, les soldats de l’Armée Rouge et les guide vers le camp. Je lui demande en mars 1971 de partir avec Beate à Cologne, où elle va se livrer à la Justice allemande après notre tentative d’enlèvement de Kurt Lischka. Ralph accepte ; endosse au tribunal sa tenue de déporté et se fait le porte-parole de Beate incarcérée.  Walter Spitzer appartenait à la même génération. Il avait survécu à la Shoah en Pologne et était arrivé en France en 1946. Son talent d’artiste et de sculpteur fut vite reconnu. Il  fut désigné pour créer le remarquable monument en hommage aux victimes de la rafle du Vél’ d’Hiv, devant lequel se rassemblent chaque année en juillet, les dirigeants de la République et les familles des victimes. Beate l’a accompagné à Buchenwald et lui a remis la croix de chevalier de la Légion d’honneur.

Dans cette période difficile et incertaine où tout nous ramène au Covid, une seule certitude, nous n’en sortirons que quand tout le monde sera vacciné ; pas seulement en France mais dans « tout le monde ». Il ne s’agit donc pas de 65 millions de doses mais de sept milliards de doses. Il nous faudra encore beaucoup de patience avant de récupérer un peu de notre monde d’avant le Covid.

Serge Klarsfeld
Président des FFDJF

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